Dix ans après l'épidémie la plus meurtrière au monde, MSF demande un stock d'urgence de traitements contre Ebola

Genève, 19 mars 2024 - Une décennie après le début de l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest qui a tué plus de 11'000 personnes en 2014, Médecins Sans Frontières estime que le monde n'est pas suffisamment équipé pour faire face à de nouvelles flambées de la maladie. L'organisation d'aide médicale d'urgence regrette de constater que bien qu’il existe désormais des possibilités de traitement, ils ne soient pas facilement accessibles à travers un stock d'urgence prêt à être utilisés dans les endroits où ils pourraient être nécessaires lors d'une future épidémie.

"Il y a dix ans, le monde n'était pas préparé à l'apparition de la maladie à virus Ebola en Afrique de l'Ouest et il n’existait pas de traitements antiviraux", explique rétrospectivement Armand Sprecher, épidémiologiste chez Médecins sans frontières. "Comme il n'y avait pas non plus de vaccins contre Ebola, l'approche la plus prometteuse dans la lutte contre la maladie était d'essayer d'inciter les gens à changer de comportement afin de limiter la transmission. Maintenant qu'il existe des traitements antiviraux et des vaccins efficaces, nous pouvons utiliser ces outils pour sauver des vies, prévenir la maladie et contrôler les épidémies, mais seulement s'ils sont entièrement disponibles pour les personnes qui en ont besoin. C'est pourquoi nous demandons la constitution d'un stock d'urgence".

Les brevets des produits médicaux sont détenus par deux groupes pharmaceutiques américains, Regeneron et Ridgeback Biotherapeutics. Presque tous les traitements actuellement disponibles dans le monde sont conservés dans un stock national de sécurité et de biodéfense utilisé par les États-Unis. Il est urgent de constituer un stock international d'urgence de ces traitements, fourni par Regeneron et Ridgeback et géré par le Groupe international de coordination (GIC) pour la fourniture de vaccins. C'est la seule façon de s'assurer que les traitements peuvent toujours et partout être mis à disposition à court terme en cas de besoin.

Après près d'un demi-siècle d'absence de traitement spécifique contre Ebola, ce n'est que lors de la plus grande épidémie, en 2014, que les fonds alloués à la recherche et au développement de traitements et de vaccins ont été considérablement augmentés. Les gouvernements des pays concernés ont notamment participé à la mise à disposition de ces 800 millions de dollars. Ils ont été soutenus par des ONG et des institutions universitaires qui ont mené ou facilité des essais cliniques. En outre, les patients et les survivants ont été directement impliqués dans l'expérimentation des traitements.

Ces traitements ont été recommandés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2022 et figurent désormais sur la liste modèle des médicaments essentiels de l'OMS.

Les deux médicaments autorisés restent en grande partie inaccessibles aux personnes qui en ont besoin lors des épidémies. Il y a de nombreux défis à relever pour fournir rapidement un traitement lors d'une épidémie d'Ebola, mais le fait que sur cinq épidémies depuis 2020, seul un tiers des patients a reçu l'un des deux médicaments est en grande partie dû au fait que les produits ne sont pas facilement disponibles là où les épidémies se produisent le plus souvent. Et ce, bien que les pays et les communautés concernés aient contribué au processus de développement. ​

Regeneron et Ridgeback conservent le contrôle privé de ces médicaments par le biais de brevets et de licences. Médecins Sans Frontières demande aux détenteurs de brevets sur les médicaments contre Ebola d'accorder des licences et de transférer la technologie à des fabricants compétents afin d'augmenter leur disponibilité.

Gaëlle Dubath Media team, Médecins Sans Frontières (MSF)
Djann Jutzeler Communications Officer, Médecins Sans Frontières

 

A propos de Médecins Sans Frontières/Ärzte ohne Grenzen (MSF)

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Médecins Sans Frontières (MSF) est une organisation médicale indépendante et neutre. Ses missions visent à porter secours aux populations dans le besoin, victimes de catastrophes naturelles comme de conflits armés – indépendamment de leur appartenance ethnique, religieuse ou de leur engagement politique.

En 1999, MSF se voit attribuer le prix Nobel de la Paix.