Soudan: Les difficultés poursuivent les Sud-soudanais réfugiés dans l’est du Darfour
Malnutrition, déshydratation, infections, diarrhées, le quotidien du camp de Kario est un calvaire pour ses résidents
Vendredi 27 juillet 2018 — Le centre d’accueil du camp de Kario est la première étape pour les nouveaux arrivants sud-soudanais avant qu’ils ne s’installent plus durablement. Chaque jour, les réfugiés sont enregistrés, la plupart d’entre eux viennent du Soudan du Sud.
Les équipes mobiles MSF se rendent au camp deux fois par semaine pour évaluer l’état de santé des nouveaux arrivants, notamment en termes de malnutrition. Elles effectuent des vaccinations et réfèrent, si besoin, certains patients vers les structures de santé MSF du camp de Kario.
Des Sud-soudanais poussés vers le Soudan
La violence et le conflit au Soudan du Sud ont déplacé des millions de personnes. Environ un tiers des sud-soudanais a dû quitter leur foyer... Dans l’est du Darfour, la majorité de la population a quitté le Soudan pour le Soudan du Sud après l’indépendance en 2011. En raison du conflit en cours, cette même population est aujourd’hui forcée à revenir sur ses pas et de retourner au Soudan. Selon le Haut-commissariat des Nations unies, plus de 750 000 Sud-soudanais sont actuellement réfugiés au Soudan et 100 000 d’entre eux vivent dans l’est du Darfour où l’hôpital MSF est installé dans le camp de Kario depuis juillet 2017. Abritant autour de 20 000 réfugiés, Kario est le plus grand camp de l'est du Darfour.
Vanessa Rossi, la coordinatrice terrain MSF dans l’est du Darfour, décrit les conditions de vie des réfugiés dans le camp de Kario : « La plupart d’entre eux n’ont pas de revenu régulier, parfois ils travaillent dans des fermes avec les locaux, mais bien sûr, c’est en fonction des saisons. Ils vivent dans des abris de fortune fabriqué avec ce qu’ils ont sous la main ; du bois, des plantes... Habituellement, les familles nombreuses de cinq à dix personnes sont logés dans de petits espaces surpeuplés, ajoute-elle. Le camp est plein en ce moment, les gens partagent des latrines qui non seulement sont à l’extérieur mais qui s’avère également être insalubres et boueuses ..En raison de la saison des pluies qui approche, le camp risque de se remplir de zones marécageuses et d’eaux stagnantes, ce qui ne fera qu’aggraver les difficultés déjà en cours.»
Les conditions de vie dans le camp sont inquiétantes. Les populations n’ont rien à manger et les enfants sont particulièrement touchés ainsi que les femmes enceintes et celles qui allaitent. Si la tendance se poursuit, il est fort probable que les cas de malnutrition sévère augmentent en particulier au début de la période de soudure*, entre mai et octobre.
Mohamed Zakria, médecin MSF, décrit la situation sanitaire dans le camp : « à cause de la chaleur et de la poussière, nous voyons beaucoup de cas d’infection des voies respiratoires, en particulier chez les enfants de moins de cinq ans, ainsi que des pneumonies, des cas de déshydratation et quelques cas de paludisme. Nous traitons aussi de nombreux nouveau-nés atteints de septicémies (une infection bactérienne de leur sang), poursuit-il, ainsi que de nombreuses femmes atteintes de septicémies puerpérales (une infection génitale qui survient pendant ou après l’accouchement). MSF espère pouvoir davantage contribuer à l’éducation en termes de santé dans le camp et auprès des communautés locales.
Une présence essentielle depuis plus d’un an
MSF est intervenue à Kario en juillet 2017 durant une épidémie de diarrhée aqueuse aigüe. MSF a immédiatement ouvert un centre de traitement de 20 lits, jusqu’à ce que le nombre de cas diminue. En parallèle, MSF a transformé le centre de santé de Kario en hôpital qui dispense des soins de santé primaire et secondaire incluant une maternité et des programmes de vaccination et de nutrition à l’attention de 40 000 personnes vivant dans la région.
La structure de santé reçoit entre 200 et 300 consultations par jour dans le service ambulatoire à l’attention des réfugiés et des membres des communautés d'accueil. L’unité d’hospitalisation comprend 20 lits et les cas urgents sont référés vers l’hôpital de la ville d’Ed-Daein.
Depuis l’épidémie de diarrhée aqueuse aigüe de l’année dernière, la prévention est l’une des principales préoccupations. « Maintenant que nous sommes ici, nous pouvons détecter tout foyer potentiel d’épidémie et rapidement mettre en place des mesures pour éviter la transmission et contenir la propagation » conclut Vanessa Rossi.
En décembre 2017, MSF a vacciné 19 000 enfants contre la rougeole pendant une campagne d’immunisation d’une semaine. Au cours de celle-ci,, une équipe de 25 travailleurs communautaires se déplaçaient quotidiennement dans le camp pour délivrer des messages de prévention.
L’hôpital MSF de Kario continue d’améliorer son offre de soin afin de répondre aux besoins croissants des patients. Malgré ces améliorations, les conditions de vie des personnes dans le camp sont terribles. MSF s’inquiète essentiellement de l’insatisfaction des besoins primaires tels que l’eau, la nourriture, l’assainissement, la disponibilité d’abris appropriés et des latrines convenables…Plus particulièrement, les conditions inhumaines dans lesquelles vivent les réfugiés dans le centre d’accueil atteint gravement leur santé mentale.
Ainsi, l’aide fournie à Kario est aujourd’hui bien en-dessous des standards humanitaires et MSF appelle la communauté humanitaire à améliorer la qualité des services fournis et à mettre en place des mécanismes de suivi appropriés.
Copyright photo: MSF/Jinane Saad
*La période de soudure correspond à la fin des stocks de nourriture sans que les récoltes soient encore possibles créant ainsi une insécurité alimentaire.